Le paradis, pour qui ?

Publié le par terre-de-femmes.over-blog.com

 

Chitwan (14)Bachhauli, Parc National du Chitwan, novembre 2011.

 

Le Népal regorge de sites naturels. Après les hautes montagnes, que l'on peut encore apercevoir au loin, la plaine du Teraï. Ici, on cultive le colza (appelé « mustard » ici). Les fleurs jaune vif contrastent avec le vert du riz.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Chitwan (7)La population aborigène, les Tharus, se distingue par ses maisons en pisé peintes de motifs très simples réalisés en trempant la paume et la tranche de la main dans des peintures vives, rouges, roses, bleues. Les femmes ont des tatouages aux bras et aux jambes.

Les habitants sont très accueillants et n'hésitent pas à vous inviter chez eux pour visiter leur maison et partager une tasse de thé. Ils sont fiers de leurs origines.

 

 

 

 

 

 

Chitwan (13)Les Tharus furent les premiers habitants de cette jungle, autrefois infestée de moustiques. Ils représentait à l'origine 90% de la population, car ils étaient les seuls à avoir développé une résistance contre la malaria. Après l'assainissement de la zone, d'autres peuples se sont installés au Chitwan, si bien que les Tharus ne représentent plus que 14% de la population aujourd'hui. L'autre conséquence de l'éradication de la malaria : les habitants des montagnes sont descendus dans la plaine fertile du Teraï. Ainsi, la population locale a triplé en l'espace de 10 ans, menaçant la faune. Dans les années 70, des démarches ont été entreprises pour sa protection et le parc a été inscrit au patrimoine de l'Unesco.

 

Chitwan (3)Signifiant « coeur de la jungle », le Chitwan est réputé pour être le principal parc d'Asie où observer la faune sauvage... à pied. C'est évidemment très tentant pour les aventuriers. Car ce n'est qu'à pied que l'on peut repérer les crottes fraiches laissées par un rhinocéros, sur un petit sentier au cœur de la jungle; ou les traces des griffes d'un tigre sur le tronc d'un arbre. Ce sont 20% des touristes du Népal qui s'aventurent sur les traces du tigre du Bengale et du Rhinocéros.

 

 

 

 

 

Chitwan (12)Le bonheur des uns fait forcément le malheur des autres....

La nature a repris ses droits, certes, l'Unesco peut que s'en féliciter. Mais au bénéfice de quoi ou de qui, au final ?

 

Les gagnants : 30% des revenus de la communauté sont attribués à la construction d'écoles, l'adduction d'eau, la construction de routes... les revenus de la communauté provenant en grande partie du tourisme, celui-ci participe de manière visible à l'amélioration des conditions de vie des habitants.

 

 

Chitwan (1)De plus, une partie des habitants tire aujourd'hui directement ses revenus du tourisme : ceux qui tiennent des pensions familiales, des hôtels et des restaurants. Les plus grands hôtels sont propriétaires d'éléphants, qui promènent les touristes sur les berges de la rivière et dans la forêt, où l'on peut observer en relative sécurité les crocodiles et les rhinocéros, mais aussi des dizaines d'espèces d'oiseaux. Le centre d'élevage des éléphants emploie 200 autochtones. Il y a aussi la location de vélos, motos et jeeps avec chauffeur pour les safaris. Sans parler des 5 « tourist-bus » qui partent chaque matin du parking à proximité de la zone touristique, pour acheminer les touristes vers la capitale.

 

P1060623--Small-.JPGLes femmes, qui font partie de la cible prioritaire dans les programmes de développement local, fabriquent des objets d'artisanat (vannerie, sculpture sur bois) et font des peintures d'oiseaux sur T-shirts, qui sont vendus dans les boutiques locales et dans une boutique communautaire. Dans cette dernière, les bénéfices sont dédiés aux femmes; elles récupèrent 2/3 du prix de vente sur les articles qu'elles ont confectionnés et 1/3 sur la vente des t-shirts. Ce qui représente un revenu d'environ 500 roupies par semaine (5€). C'est le prix d'une nuit dans une chambre avec salle de bain dans un lodge à « petit budget ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Chitwan (2)Les touristes, of course... Tous les matins, le « bain des éléphants » fait l'attraction. Pour 100 roupies (1€), l'on peut grimper sur le dos de l'un de ces pachydermes pour prendre une bonne douche froide ! Les éléphants, dociles, répondent aux injonctions de leurs cornacs en aspergeant les courageux, sous les rires et les applaudissements des badauds. Ensuite, les éléphants repartent dans leur bercail, attachés par de grosses chaînes aux pattes avant et arrière, qui les empêchent totalement de bouger... peu de gens viennent voir l'arrière du décor, et quand bien même, ils ont passé un bon moment de rigolade, c'est ce qui importe.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Chitwan (8)Les perdants : il est certainement important de conserver faune et flore sauvages, mais dans ce cas, la décision de faire de cette zone une réserve naturelle protégée a obligé une partie de la population, probablement la plus pauvre, qui vivait dans la forêt, de quitter son habitat. Ce sont ainsi des milliers de familles qui ont été relogées, par contrainte, dans des villages en dehors de la jungle, mais sans compensation suffisante pour retrouver la qualité de vie qu'elles avaient auparavant. En effet, c'était des familles qui vivaient en autarcie. Elles cultivaient quelques parcelles de terre qu'elles avaient gagné sur la forêt, et allaient chercher leur complément dans la forêt (herbe, fruits, plantes médicinales).

Chitwan (6)Ces habitants vivaient de et avec la nature. Or, l'allocation de relogement accordée par le gouvernement n'a tenu compte que de la taille des parcelles qu'ils détenaient. Ils se sont alors retrouvés avec des peaux de chagrin, insuffisantes pour assurer leur subsistance. Aujourd'hui, les habitants ont une autorisation restreinte de ramasser l'herbe dans le parc, sur seulement 10 jours par an. Avec un droit à payer de 5 roupies par personne. Cette herbe leur sert pour construire leur habitat (pisé), fabriquer matelas et ustensiles quotidiens (vannerie).

 

 

 

 

Chitwan (4)La nature elle-même n'est pas totalement gagnante. Car déchets et pollution rime avec tourisme. Ce sont des tonnes de bouteilles en plastique et autres emballages et sachets qui sont stockés on ne sait où. Que l'on voit flotter parfois sur la rivière, emportés par les flots. La gestion du tourisme fait partie des enjeux majeurs du parc, au même titre que la gestion de l'habitat, les ressources humaines, les conflits des habitants du parc, le développement des infrastructures. Ainsi, on trouve des poubelles et un gros container de récupération des bouteilles plastiques est posté au centre de l'activité touristique, mais combien les utilisent vraiment ? Et qu'en fait-on ensuite ? J'attends de voir une usine de recyclage...

 

Chitwan (11)

Publié dans Chroniques Népal

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A
Tes articles sont tres interessants. Nous en sommes fans!
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